La légende de Paititi
Paititi est l’une des très rares grandes cités mythiques. Sa légende a fait le tour du globe, au même titre que celle de l’Atlantide, du continent perdu de Mu, ou des mines du roi Salomon. Car Paititi n’est pas n’importe quelle cité perdue : après la conquête de l’empire inca par les espagnols, cette ville introuvable est devenue, aux yeux de tous, l’Eldorado. Elle a fait rêver des millions de personnes tout au long de l’histoire, ce qui a malheureusement coûté des dizaines de milliers de vies, sans être découverte jusqu’à ce jour. La très mystique Paititi est entourée d’une véritable légende, dont voici les principaux traits :
On ne devient pas l’Eldorado sans receler un fabuleux trésor : Paititi serait la cité secrète où les derniers incas, ayant constaté l’appétit sans limite des envahisseurs pour l’or, auraient mis à l’abri la grande majorité de leurs objets sacrés. Quand cette précaution fut prise les espagnols n’étaient encore qu’une poignée mais avaient cependant déjà pillé des tonnes d’or et d’argent. Quand ils torturèrent des prisonniers pour savoir où était passé le reste, ceux-ci auraient pris un seul grain dans un tas de maïs, en leur déclarant « Voici la part du trésor que vous avez réussi à prendre. Le reste a été mis à l’abri, et vous échappera pour toujours »
Paititi est le nom européen de Paikinkin ou Paiquinquin Qosqo qui signifie « la jumelle de Cusco ». Quand on connait quelle fut la taille, la splendeur architecturale, le luxe inouï de la capitale Inca, nombril d’un des plus grands empires de tous les temps vers lequel convergeaient toutes les richesses, tous les savoirs-faire, on comprend que sa « jumelle » ne peut pas être une petite cité classique. Paititi serait une ville immense, la plus impressionnante découverte archéologique du siècle. D’autant plus que, contrairement à la grande Angkor ou aux majestueux vestiges égyptiens, elle n’aurait jamais été pillée.
Selon la légende, Paititi est la ville mystique du savoir. Le centre et l’origine des croyances Incas, le plus grand lieu sacré de cette civilisation. Le lieu où aurait été confinée une écriture andine, venue de civilisations amazoniennes plus anciennes, et jalousement gardée par les sages Incas. Ils auraient ainsi consigné toute l’histoire, les connaissances, les rites de leur peuple. Mais aussi tous les secrets des mystérieuses civilisations qui les ont précédé sur la sierra et dont ils ont conquis l’ancien territoire (Nazca, Tiahuanaco..). Paititi serait une véritable bibliothèque sur le passé d’un continent dont on ignore encore aujourd’hui énormément de choses du fait du manque de la moindre trace écrite.
Enfin, le royaume de Paititi, situé quelque part dans l’inaccessible et encore très méconnue forêt amazonienne, aurait été le refuge et la capitale des derniers empereurs Incas. Ils y auraient rétabli leur cour après la prise de Cusco par les espagnols, et seraient, grâce au secret qu’à toujours entretenu cette cité sacrée autour d’elle, restés à l’écart de toute intrusion. Depuis lors, les anciens des Andes disent que « A Païtiti vit Inkarri Intipchurrin (l’Inca Roi Souverain fils du Soleil) qui jusqu’à maintenant règne dans le silence, se préparant pour rétablir l’ordre interrompu de l’univers. »
Paititi, cette cité légendaire… je l’ai découverte.
Et ce n’est pas une blague, ou le délire d’un quelconque illuminé.
J’en suis le premier surpris, mais les preuves sont là comme vous pourrez en juger par vous-même.
Comment Paititi est devenue l’Eldorado
Au départ de la légende d’Eldorado, il y aurait un récit:
Les espagnols prennent solidement pied sur les côtes Péruviennes en 1532. Alors qu’ils explorent la région, un indien portant un message à l’Inca Atahualpa tombe entre leurs mains. Interrogé, il révéla finalement être originaire du nord de l’empire, et il leur confia qu’une tribu à l’est de la sienne procédait à un rituel qui intéressa les espagnols au plus haut point : Le monarque était oint d’essence de térébenthine, puis entièrement recouvert de paillettes d’or, afin de luire comme le soleil. Il embarquait sur un radeau couvert d’offrandes en or, et s’immergeait dans le lac pour se purifier pendant que les nobles qui l’accompagnaient jetaient les trésors dans lac sacré.
Le capitaine Sebastian de Benalcazar baptisa ce souverain « El Dorado » c’est-à-dire « Le Doré ». Il se trouve que les Muiscas en Colombie procédaient des siècles auparavant à un rituel semblable, mais les espagnols n’en savaient encore rien. Influencés par le mythe déjà connu des « Cités d’or » aux indes (en réalité les toits dorés des pagodes aperçues par les premiers européens), l’Eldorado devint rapidement pour eux un lieu plutôt qu’une personne, car ils pensaient que ce monarque devait habiter une cité extrêmement riche en trésors pour se permettre d’en jeter de telles quantités à l’eau chaque année.
Arrivés en pleine guerre civile dans l’empire, les espagnols jouèrent à merveille leur partie et parvinrent à se faire de nombreux alliés parmi les peuples soumis depuis trop longtemps aux Incas, laissés libres de leurs mouvements depuis que ces derniers s’entredéchiraient. Au terme d’un épisode particulièrement aventureux, Pizarro parvint à capturer celui qui était le plus proche de stabiliser l’empire, l’Inca Atahualpa. Après avoir perçu une énorme rançon pour sa libération, il le fit exécuter. Par la suite Manco Inca aidera le conquistador à conquérir Cusco, que les troupes d’Atahualpa tenaient toujours.
Manco Inca devait gouverner, mais il déchanta bien vite : les espagnols, soutenus par leurs alliés locaux, l’humilièrent et le réduisirent au rôle de pantin. L’Inca se révolta alors et réunit une immense armée, assiégeant Cusco et Lima où les espagnols et leurs alliés s’étaient réfugiés. Cependant en 1536 ses troupes sont défaites dans le nord et il ne peut plus tenir le siège de la ville. Il aurait alors rassemblé à travers l’immense empire tous les objets sacrés en métal précieux que les conquistadors n’avaient pas encore dérobé, et s’enfonça avec ce trésor dans une région inaccessible restée vierge de présence espagnole.
Quand Cusco est reprise, certains des partisans de Manco sont faits prisonniers. Pressés par les questions des espagnols, les prisonniers réunissent alors un important tas de maïs, puis en donnent un seul grain à leurs bourreaux : c’est, selon eux, la portion du trésor Inca que les espagnols ont pu dérober, et le reste, dont une chaine en or de deux cents mètres dont les maillons faisait la taille d’un pouce, leur échapperait à tout jamais. En quittant Cusco, l’Inca était passé par Lares, au nord-est, connue pour être le lieu de villégiature de nombreux nobles, en amassant probablement beaucoup de biens de valeur. On sait aussi qu’il a récupéré les momies sacrées de ses ancêtres de Cusco, probablement en allant vider les sanctuaires où elles étaient couvertes d’offrandes précieuses.
Où est passé ce trésor ? Des chroniqueurs font mention d’une colonne de 20.000 lamas chargés d’or qui traversa alors les montagnes au niveau d’une certaine Vilcabamba. Finalement, une rumeur se répandit dans la capitale, et fut assez étayée pour perdurer jusqu’à nos jours : L’Inca se serait réfugié dans une cité secrète où il aurait mis les trésors sacrés en sûreté et rétabli sa cour, pour faire perdurer l’empire et un jour revenir au pouvoir. Cette cité se nommait Paititi, mais aucun habitant ne pouvait clairement dire où elle se situait. La très mystique et hautement sacrée « sœur de Cusco » dû probablement sa survie au fait que les rares érudits, prêtres et nobles qui en connaissaient l’emplacement avaient fui pour la rejoindre soit avec le prince Inca Shock Auqui durant la guerre civile quelques années auparavant, soit avec Manco Inca.
Le chroniqueur Maúrtua rapporte que finalement l’un des habitants interrogé aurait tout de même fini par livrer que « L’Inca, les couronnes et beaucoup d’autres choses sont à la jonction de la rivière Païtiti et la rivière Pamara, à trois jours de marche de la rivière Manu». Mais les espagnols ne purent pas se lancer immédiatement à sa poursuite, car la guerre qu’ils se menaient entre eux pour le contrôle de Cusco leur fit perdre presque une année. Quand un détachement de cavalerie retrouve Manco Inca en juin 1537, il est à Ollantaytambo avec une petite troupe et se replie sur Chuquichaca, puis Vitcos. Mais personne ne sait ce qu’il a fait pendant un an, et avec lui, plus aucun trésor encombrant.
Jamais le trésor n’a été retrouvé par les espagnols, et pour cause : Ils ne savaient pas où s’arrêtait l’empire, ni dans quelle direction chercher Paititi, ou toute autre cité qui aurait pu ressembler à l’Eldorado. La région est gigantesque, particulièrement inhospitalière pour les européens, et le mot est encore faible. Les chemins difficiles, étroits et tortueux sont autant de sites d’embuscades possibles dans une optique de guérilla, ce que Manco dans les montagnes, ou les tribus indiennes dans la forêt surent à merveille exploiter pour renvoyer leurs quelques expéditions chez elles, décimées.
Il est intéressant à ce sujet de lire le récit que fait Antonio de Herrera à propos de l’expédition que mena Pedro de Candía de juin à octobre 1538. Ce soldat et ami fidèle de Pizarro obtint des informations de la part d’une concubine indigène, qui lui décrivit une terre extrêmement riche appelée Ambaya, située à l’est des Andes. Pedro de Candía investit la totalité de sa part personnelle du butin (85.000 pesos d’or, soit près de 400 kg tout de même, ce qui donne un aperçu de ce que les espagnols ont pillé déjà en 1538…) dans l’expédition. Ce fut un calvaire et un échec cuisant.
Bien d’autres tentèrent l’aventure et se lancèrent à la recherche de la cité d’or perdue, au XVIme siècle mais aussi plus tard, et jusqu’à nos jours. Si ils ont tous échoué, la quête effrénée de Paititi conduisit à la conquête d’une grande majorité du continent sud-américain.
Voici les plus intéressantes expéditions :
En 1539 Sebastian de Benalcazar apprend que la tribu des Muiscas, voisine de l’empire Inca au nord-est, a pour coutume d’immerger son souverain dans un lac sacré. Les indiens locaux l’amenèrent au lac sacré de Guatavita, niché dans le cratère d’un volcan à environ 50 km au nord de l’actuelle Bogota. Point de cité d’or, point de richesses chez cette tribu sur le déclin qui était loin de rivaliser en techniques et en prospérité avec l’empire Inca. Seulement un lac au fond duquel reposaient de possibles offrandes, inaccessibles. Le mythe de l’Eldorado, qui avait pourtant probablement trouvé son origine ici, perdurait.
En 1541 Gonzalo Pizarro et Francisco de Orellana partirent également à la recherche du fameux Eldorado, cette fois-ci en l’identifiant comme Paititi, la cité du trésor perdu des incas, le « pays de la cannelle » comme les incas la décrivaient (car pour eux l’or n’avait pas de valeur marchande, contrairement à cette épice et aux plantes médicinales). Ils partirent de la vallée de Zumaco, arrivèrent dans la vallée de la rivière Coca en juin et prirent comme guide le chef de la tribu des Omagua. Sur la forte troupe de 300 espagnols et 4000 indiens qu’ils avaient emmenée, une grande majorité mourut de faim, de fièvres, ou sous les flèches des tribus belliqueuses. De Orellana fit brûler et dévorer par ses chiens ses guides indigènes qui ne l’avaient pas mené à l’Eldorado. Il fit ensuite construire un esquif pour quérir des vivres sur le rio Napo, mais emporté par les courants il fit un incroyable voyage de 4800 km jusqu’à l’océan Atlantique. En chemin, il relatera avoir combattu une tribu dirigée par des femmes guerrières, et baptisera le rio « Amazone ».
Les espagnols torturent à cette période un nombre incalculable de malheureux indiens pour avoir des informations sur l’Eldorado. Dans les années 1550 une expédition dirigée par Francisco de Aquino quitte Cuzco à la recherche du royaume de Païtiti, mais échoue. En 1568, une autre tentative menée par Juan Alvarez de Maldonado connait une fin tragique. Quand, en 1572 le dernier Inca est capturé avec de maigres troupes dans ce que les espagnols croyaient depuis des décennies être sa capitale, ils tombent sur le village de Vilcabamba, en cendres, qui n’a rien d’une cité d’or ou d’une véritable cité tout court. Ils finiront par abandonner cette région difficile, et sans intérêt économique ou stratégique.
Suite aux échecs successifs terriblement coûteux en vie humaines, au cours du XVIIème siècle le royaume de Païtiti est quelque peu oublié. Les jésuites qui seuls s’implantent dans les confins de la région du Madre de Dios s’intéressent à Paititi, et regroupent des informations confirmant l’existence de cette cité : Par exemple la lettre que le père Andrea Lopez adresse à Claude Acquaviva son supérieur, découverte en 2001 par l’archéologue Mario Polia dans les archives du Vatican, où il décrit un royaume de Paititi démesurément riche en or et en argent, ayant conservé les techniques inca de métallurgie et de construction monumentale, ainsi qu’une organisation politique avancée avec à sa tête l’Inca.
Egalement, la très intéressante description de Paititi faite par Francisco de Cale en 1686 d’après le témoignage d’un indigène, celle de Benito Jerónimo Feijoo en 1730… Une vieille carte traduite à cette époque du quechua par un missionnaire jésuite est conservée aujourd’hui dans le musée ecclésiastique de Cuzco. Sur le fond de la carte sont dessinées des rivières et des montagnes, entourées d’un mystérieux texte qui semble ésotérique. Retrouvée bien plus tard, elle aiguisera la curiosité des aventuriers modernes.
Au milieu du XVIIIème siècle Paititi refait surface, en particulier à Cuzco, mais a prit une dimension mythique. Ainsi, lors la rébellion du mois de mai 1742, le péruvien Juan Santos Atahualpa savait « qu’un cousin frère régnait dans le Grand Païtiti » comme le rapporte le Dr Franklin García Irigoyen. Etait-ce une manière de rallier à lui le peuple soumis et atrocement opprimé, en évoquant la figure de l’Inca ?
A la même période, de l’autre côté du continent, un aventurier portugais anonyme se basa sur le récit de Roberio Dias, petit fils d’un de ses compatriotes ayant vécu parmi les indiens, pour se lancer à la recherche de mines d’or et de diamants dans les profondeurs de la forêt brésilienne. Son interminable voyage l’emmena bien plus loin qu’il ne l’escomptait, jusqu’à ce qu’il a décrit comme les abords une cordillère, orientée sud-est / nord-ouest. Il découvrit une immense cité aux murs cyclopéens, si typiques de l’architecture inca, à moitié recouverts de végétation. Il semble qu’il fut proche du Pérou espagnol car il relate dans son manuscrit qu’il redoutait de rencontrer une troupe armée de cette nation rivale.
Au XIXème siècle Paititi, le troisième grand royaume des Amériques dont la capitale est une cité regorgeant de trésors cachée au fond de l’Amazonie, resté introuvable depuis des siècles, est définitivement assimilé au mythe de l’Eldorado et à celui des Cités d’or. Et par la même occasion relégué au rang de légende par Alexandre de Humbolt qui cartographie le continent.
Ce qui n’empêche pas Hiran Bingham de trouver le Machu Pichu en 1912, alors qu’il cherchait Païtiti.
Dans les années 1920, Sir Percy Harrison Fawcett, un officier anglais quelque peu excentrique mais courageux se basa sur le manuscrit du portugais (dont l’aventure est relatée plus haut) pour rechercher les traces des descendants des Atlantes, qui selon lui se seraient réfugiés au coeur de l’Amazonie, et auraient été à l’origine des cultures pré-inca. Accumulant les témoignages d’indigènes et d’explorateurs au cours de ses huit expéditions, il pensait avoir découvert l’avant-poste d’une grande cité dans le Mato Grosso, au pied d’une montagne. Il disparut dans la jungle à la veille de sa découverte annoncée.
Fawcett connu une certaine médiatisation, et fit naitre des vocations. Depuis les années 1960 des dizaines d’expéditions archéologiques, qui parfois se sont terminées tragiquement, ont été menées pour retrouver la cité perdue de Paititi. Je ne vais pas les énumérer ici, mais en tirer deux constats :
Toutes réunies, elles n’ont permis d’explorer qu’un centième de ce continent de forêt dense.
Et partout dans l’immense zone forestière qui correspondait à l’Antisuyu, des vestiges, voire de petites cités incas furent retrouvés. Cette région encore bien méconnue, l’une des quatre grandes provinces de l’empire, devait bien avoir une capitale…
Une « légende » qui sonne trop vrai
Si comme nous l’avons vu elle a été assimilée peu à peu à l’Eldorado ou aux Cités d’or, qui sont des mythes c’est à dire la déformation imaginaire de faits réels, après 400 ans Paititi continue à aiguiser, peut-être plus que jamais, la curiosité des archéologues. Certains parmi les plus reconnus commencent même à avoir le courage d’au moins envisager sa possible réalité : En effet de nombreuses découvertes récentes remettent en question le dogme imposé par l’académie qui, dans la droite lignée de la mentalité colonialiste espagnole refuse depuis le XVIeme siècle de concevoir que dans la forêt des « sauvages » ait pu un jour se développer une quelconque forme de civilisation.
Si le royaume perdu de Paititi en particulier suscite autant d’intérêt de la part des professionnels, c’est parce que sa « légende » a une particularité : Ses sources sont très nombreuses, et certaines tout à fait dignes de confiance, car se sont les mêmes qui nous ont permis de connaître l’histoire inca. Surtout, toutes ces sources pourtant distinctes dans le temps et l’espace sont convergentes sur les moindres détails.
Les éléments qui composent la « légende » de Paititi proviennent de deux groupes de sources :
Il s’agit en grande majorité des récits de chroniqueurs de l’époque, qui rapportent les témoignages d’indiens locaux ou d’incas interrogés sur Paititi, sa localisation, ou ce qu’il y avait là-bas. Si certains auteurs avaient tendance à déformer les faits, ce n’était pas systématique loin de là, et d’autres sont réputés beaucoup plus fiables. La multiplicité et la concordance des récits de l’époque interpelle forcément.
D’autres sources sont plus récentes : il s’agit de souvenirs transmis oralement et recueillis par les anthropologues modernes auprès de tribus restées isolées jusqu’à très récemment comme les Q’eros, ou par les religieux auprès des populations des vallées au nord de Cusco, où ces histoires sont racontées au cours des veillées depuis des générations, dans chaque famille.
Un autre aspect qui interpelle, est que cette « légende » ne comporte aucun élément fantastique ou créature chimérique. Bien au contraire, toutes les descriptions indiquent des caractéristiques de la géographie du terrain, de certains bâtiments, des noms de lieux, des distances, et décrivent même précisément un certain mode de vie, des habits, des savoirs-faire, une organisation sociale bien particulière, etc…
Ces très nombreux détails réalistes et la multiplicité des sources laissent à penser que tout n’a pas pu être inventé.
© Vincent Pélissier 2016
La légende de Paititi
Paititi est l’une des très rares grandes cités mythiques. Sa légende a fait le tour du globe, au même titre que celle de l’Atlantide, du continent perdu de Mu, ou des mines du roi Salomon. Car Paititi n’est pas n’importe quelle cité perdue : après la conquête de l’empire inca par les espagnols, cette ville introuvable est devenue, aux yeux de tous, l’Eldorado. Elle a fait rêver des millions de personnes tout au long de l’histoire, ce qui a malheureusement coûté des dizaines de milliers de vies, sans être découverte jusqu’à ce jour. La très mystique Paititi est entourée d’une véritable légende, dont voici les principaux traits :
On ne devient pas l’Eldorado sans receler un fabuleux trésor : Paititi serait la cité secrète où les derniers incas, ayant constaté l’appétit sans limite des envahisseurs pour l’or, auraient mis à l’abri la grande majorité de leurs objets sacrés. Quand cette précaution fut prise les espagnols n’étaient encore qu’une poignée mais avaient cependant déjà pillé des tonnes d’or et d’argent. Quand ils torturèrent des prisonniers pour savoir où était passé le reste, ceux-ci auraient pris un seul grain dans un tas de maïs, en leur déclarant « Voici la part du trésor que vous avez réussi à prendre. Le reste a été mis à l’abri, et vous échappera pour toujours »
Paititi est le nom européen de Paikinkin ou Paiquinquin Qosqo qui signifie « la jumelle de Cusco ». Quand on connait quelle fut la taille, la splendeur architecturale, le luxe inouï de la capitale Inca, nombril d’un des plus grands empires de tous les temps vers lequel convergeaient toutes les richesses, tous les savoirs-faire, on comprend que sa « jumelle » ne peut pas être une petite cité classique. Paititi serait une ville immense, la plus impressionnante découverte archéologique du siècle. D’autant plus que, contrairement à la grande Angkor ou aux majestueux vestiges égyptiens, elle n’aurait jamais été pillée.
Selon la légende, Paititi est la ville mystique du savoir. Le centre et l’origine des croyances Incas, le plus grand lieu sacré de cette civilisation. Le lieu où aurait été confinée une écriture andine, venue de civilisations amazoniennes plus anciennes, et jalousement gardée par les sages Incas. Ils auraient ainsi consigné toute l’histoire, les connaissances, les rites de leur peuple. Mais aussi tous les secrets des mystérieuses civilisations qui les ont précédé sur la sierra et dont ils ont conquis l’ancien territoire (Nazca, Tiahuanaco..). Paititi serait une véritable bibliothèque sur le passé d’un continent dont on ignore encore aujourd’hui énormément de choses du fait du manque de la moindre trace écrite.
Enfin, le royaume de Paititi, situé quelque part dans l’inaccessible et encore très méconnue forêt amazonienne, aurait été le refuge et la capitale des derniers empereurs Incas. Ils y auraient rétabli leur cour après la prise de Cusco par les espagnols, et seraient, grâce au secret qu’à toujours entretenu cette cité sacrée autour d’elle, restés à l’écart de toute intrusion. Depuis lors, les anciens des Andes disent que « A Païtiti vit Inkarri Intipchurrin (l’Inca Roi Souverain fils du Soleil) qui jusqu’à maintenant règne dans le silence, se préparant pour rétablir l’ordre interrompu de l’univers. »
Paititi, cette cité légendaire… je l’ai découverte.
Et ce n’est pas une blague, ou le délire d’un quelconque illuminé.
J’en suis le premier surpris, mais les preuves sont là comme vous pourrez en juger par vous-même.
Comment Paititi est devenue l’Eldorado
Au départ de la légende d’Eldorado, il y aurait un récit:
Les espagnols prennent solidement pied sur les côtes Péruviennes en 1532. Alors qu’ils explorent la région, un indien portant un message à l’Inca Atahualpa tombe entre leurs mains. Interrogé, il révéla finalement être originaire du nord de l’empire, et il leur confia qu’une tribu à l’est de la sienne procédait à un rituel qui intéressa les espagnols au plus haut point : Le monarque était oint d’essence de térébenthine, puis entièrement recouvert de paillettes d’or, afin de luire comme le soleil. Il embarquait sur un radeau couvert d’offrandes en or, et s’immergeait dans le lac pour se purifier pendant que les nobles qui l’accompagnaient jetaient les trésors dans lac sacré.
Le capitaine Sebastian de Benalcazar baptisa ce souverain « El Dorado » c’est-à-dire « Le Doré ». Il se trouve que les Muiscas en Colombie procédaient des siècles auparavant à un rituel semblable, mais les espagnols n’en savaient encore rien. Influencés par le mythe déjà connu des « Cités d’or » aux indes (en réalité les toits dorés des pagodes aperçues par les premiers européens), l’Eldorado devint rapidement pour eux un lieu plutôt qu’une personne, car ils pensaient que ce monarque devait habiter une cité extrêmement riche en trésors pour se permettre d’en jeter de telles quantités à l’eau chaque année.
Arrivés en pleine guerre civile dans l’empire, les espagnols jouèrent à merveille leur partie et parvinrent à se faire de nombreux alliés parmi les peuples soumis depuis trop longtemps aux Incas, laissés libres de leurs mouvements depuis que ces derniers s’entredéchiraient. Au terme d’un épisode particulièrement aventureux, Pizarro parvint à capturer celui qui était le plus proche de stabiliser l’empire, l’Inca Atahualpa. Après avoir perçu une énorme rançon pour sa libération, il le fit exécuter. Par la suite Manco Inca aidera le conquistador à conquérir Cusco, que les troupes d’Atahualpa tenaient toujours.
Manco Inca devait gouverner, mais il déchanta bien vite : les espagnols, soutenus par leurs alliés locaux, l’humilièrent et le réduisirent au rôle de pantin. L’Inca se révolta alors et réunit une immense armée, assiégeant Cusco et Lima où les espagnols et leurs alliés s’étaient réfugiés. Cependant en 1536 ses troupes sont défaites dans le nord et il ne peut plus tenir le siège de la ville. Il aurait alors rassemblé à travers l’immense empire tous les objets sacrés en métal précieux que les conquistadors n’avaient pas encore dérobé, et s’enfonça avec ce trésor dans une région inaccessible restée vierge de présence espagnole.
Quand Cusco est reprise, certains des partisans de Manco sont faits prisonniers. Pressés par les questions des espagnols, les prisonniers réunissent alors un important tas de maïs, puis en donnent un seul grain à leurs bourreaux : c’est, selon eux, la portion du trésor Inca que les espagnols ont pu dérober, et le reste, dont une chaine en or de deux cents mètres dont les maillons faisait la taille d’un pouce, leur échapperait à tout jamais. En quittant Cusco, l’Inca était passé par Lares, au nord-est, connue pour être le lieu de villégiature de nombreux nobles, en amassant probablement beaucoup de biens de valeur. On sait aussi qu’il a récupéré les momies sacrées de ses ancêtres de Cusco, probablement en allant vider les sanctuaires où elles étaient couvertes d’offrandes précieuses.
Où est passé ce trésor ? Des chroniqueurs font mention d’une colonne de 20.000 lamas chargés d’or qui traversa alors les montagnes au niveau d’une certaine Vilcabamba. Finalement, une rumeur se répandit dans la capitale, et fut assez étayée pour perdurer jusqu’à nos jours : L’Inca se serait réfugié dans une cité secrète où il aurait mis les trésors sacrés en sûreté et rétabli sa cour, pour faire perdurer l’empire et un jour revenir au pouvoir. Cette cité se nommait Paititi, mais aucun habitant ne pouvait clairement dire où elle se situait. La très mystique et hautement sacrée « sœur de Cusco » dû probablement sa survie au fait que les rares érudits, prêtres et nobles qui en connaissaient l’emplacement avaient fui pour la rejoindre soit avec le prince Inca Shock Auqui durant la guerre civile quelques années auparavant, soit avec Manco Inca.
Le chroniqueur Maúrtua rapporte que finalement l’un des habitants interrogé aurait tout de même fini par livrer que « L’Inca, les couronnes et beaucoup d’autres choses sont à la jonction de la rivière Païtiti et la rivière Pamara, à trois jours de marche de la rivière Manu». Mais les espagnols ne purent pas se lancer immédiatement à sa poursuite, car la guerre qu’ils se menaient entre eux pour le contrôle de Cusco leur fit perdre presque une année. Quand un détachement de cavalerie retrouve Manco Inca en juin 1537, il est à Ollantaytambo avec une petite troupe et se replie sur Chuquichaca, puis Vitcos. Mais personne ne sait ce qu’il a fait pendant un an, et avec lui, plus aucun trésor encombrant.
Jamais le trésor n’a été retrouvé par les espagnols, et pour cause : Ils ne savaient pas où s’arrêtait l’empire, ni dans quelle direction chercher Paititi, ou toute autre cité qui aurait pu ressembler à l’Eldorado. La région est gigantesque, particulièrement inhospitalière pour les européens, et le mot est encore faible. Les chemins difficiles, étroits et tortueux sont autant de sites d’embuscades possibles dans une optique de guérilla, ce que Manco dans les montagnes, ou les tribus indiennes dans la forêt surent à merveille exploiter pour renvoyer leurs quelques expéditions chez elles, décimées.
Il est intéressant à ce sujet de lire le récit que fait Antonio de Herrera à propos de l’expédition que mena Pedro de Candía de juin à octobre 1538. Ce soldat et ami fidèle de Pizarro obtint des informations de la part d’une concubine indigène, qui lui décrivit une terre extrêmement riche appelée Ambaya, située à l’est des Andes. Pedro de Candía investit la totalité de sa part personnelle du butin (85.000 pesos d’or, soit près de 400 kg tout de même, ce qui donne un aperçu de ce que les espagnols ont pillé déjà en 1538…) dans l’expédition. Ce fut un calvaire et un échec cuisant.
Bien d’autres tentèrent l’aventure et se lancèrent à la recherche de la cité d’or perdue, au XVIme siècle mais aussi plus tard, et jusqu’à nos jours. Si ils ont tous échoué, la quête effrénée de Paititi conduisit à la conquête d’une grande majorité du continent sud-américain.
Voici les plus intéressantes expéditions :
En 1539 Sebastian de Benalcazar apprend que la tribu des Muiscas, voisine de l’empire Inca au nord-est, a pour coutume d’immerger son souverain dans un lac sacré. Les indiens locaux l’amenèrent au lac sacré de Guatavita, niché dans le cratère d’un volcan à environ 50 km au nord de l’actuelle Bogota. Point de cité d’or, point de richesses chez cette tribu sur le déclin qui était loin de rivaliser en techniques et en prospérité avec l’empire Inca. Seulement un lac au fond duquel reposaient de possibles offrandes, inaccessibles. Le mythe de l’Eldorado, qui avait pourtant probablement trouvé son origine ici, perdurait.
En 1541 Gonzalo Pizarro et Francisco de Orellana partirent également à la recherche du fameux Eldorado, cette fois-ci en l’identifiant comme Paititi, la cité du trésor perdu des incas, le « pays de la cannelle » comme les incas la décrivaient (car pour eux l’or n’avait pas de valeur marchande, contrairement à cette épice et aux plantes médicinales). Ils partirent de la vallée de Zumaco, arrivèrent dans la vallée de la rivière Coca en juin et prirent comme guide le chef de la tribu des Omagua. Sur la forte troupe de 300 espagnols et 4000 indiens qu’ils avaient emmenée, une grande majorité mourut de faim, de fièvres, ou sous les flèches des tribus belliqueuses. De Orellana fit brûler et dévorer par ses chiens ses guides indigènes qui ne l’avaient pas mené à l’Eldorado. Il fit ensuite construire un esquif pour quérir des vivres sur le rio Napo, mais emporté par les courants il fit un incroyable voyage de 4800 km jusqu’à l’océan Atlantique. En chemin, il relatera avoir combattu une tribu dirigée par des femmes guerrières, et baptisera le rio « Amazone ».
Les espagnols torturent à cette période un nombre incalculable de malheureux indiens pour avoir des informations sur l’Eldorado. Dans les années 1550 une expédition dirigée par Francisco de Aquino quitte Cuzco à la recherche du royaume de Païtiti, mais échoue. En 1568, une autre tentative menée par Juan Alvarez de Maldonado connait une fin tragique. Quand, en 1572 le dernier Inca est capturé avec de maigres troupes dans ce que les espagnols croyaient depuis des décennies être sa capitale, ils tombent sur le village de Vilcabamba, en cendres, qui n’a rien d’une cité d’or ou d’une véritable cité tout court. Ils finiront par abandonner cette région difficile, et sans intérêt économique ou stratégique.
Suite aux échecs successifs terriblement coûteux en vie humaines, au cours du XVIIème siècle le royaume de Païtiti est quelque peu oublié. Les jésuites qui seuls s’implantent dans les confins de la région du Madre de Dios s’intéressent à Paititi, et regroupent des informations confirmant l’existence de cette cité : Par exemple la lettre que le père Andrea Lopez adresse à Claude Acquaviva son supérieur, découverte en 2001 par l’archéologue Mario Polia dans les archives du Vatican, où il décrit un royaume de Paititi démesurément riche en or et en argent, ayant conservé les techniques inca de métallurgie et de construction monumentale, ainsi qu’une organisation politique avancée avec à sa tête l’Inca.
Egalement, la très intéressante description de Paititi faite par Francisco de Cale en 1686 d’après le témoignage d’un indigène, celle de Benito Jerónimo Feijoo en 1730… Une vieille carte traduite à cette époque du quechua par un missionnaire jésuite est conservée aujourd’hui dans le musée ecclésiastique de Cuzco. Sur le fond de la carte sont dessinées des rivières et des montagnes, entourées d’un mystérieux texte qui semble ésotérique. Retrouvée bien plus tard, elle aiguisera la curiosité des aventuriers modernes.
Au milieu du XVIIIème siècle Paititi refait surface, en particulier à Cuzco, mais a prit une dimension mythique. Ainsi, lors la rébellion du mois de mai 1742, le péruvien Juan Santos Atahualpa savait « qu’un cousin frère régnait dans le Grand Païtiti » comme le rapporte le Dr Franklin García Irigoyen. Etait-ce une manière de rallier à lui le peuple soumis et atrocement opprimé, en évoquant la figure de l’Inca ?
A la même période, de l’autre côté du continent, un aventurier portugais anonyme se basa sur le récit de Roberio Dias, petit fils d’un de ses compatriotes ayant vécu parmi les indiens, pour se lancer à la recherche de mines d’or et de diamants dans les profondeurs de la forêt brésilienne. Son interminable voyage l’emmena bien plus loin qu’il ne l’escomptait, jusqu’à ce qu’il a décrit comme les abords une cordillère, orientée sud-est / nord-ouest. Il découvrit une immense cité aux murs cyclopéens, si typiques de l’architecture inca, à moitié recouverts de végétation. Il semble qu’il fut proche du Pérou espagnol car il relate dans son manuscrit qu’il redoutait de rencontrer une troupe armée de cette nation rivale.
Au XIXème siècle Paititi, le troisième grand royaume des Amériques dont la capitale est une cité regorgeant de trésors cachée au fond de l’Amazonie, resté introuvable depuis des siècles, est définitivement assimilé au mythe de l’Eldorado et à celui des Cités d’or. Et par la même occasion relégué au rang de légende par Alexandre de Humbolt qui cartographie le continent.
Ce qui n’empêche pas Hiran Bingham de trouver le Machu Pichu en 1912, alors qu’il cherchait Païtiti.
Dans les années 1920, Sir Percy Harrison Fawcett, un officier anglais quelque peu excentrique mais courageux se basa sur le manuscrit du portugais (dont l’aventure est relatée plus haut) pour rechercher les traces des descendants des Atlantes, qui selon lui se seraient réfugiés au coeur de l’Amazonie, et auraient été à l’origine des cultures pré-inca. Accumulant les témoignages d’indigènes et d’explorateurs au cours de ses huit expéditions, il pensait avoir découvert l’avant-poste d’une grande cité dans le Mato Grosso, au pied d’une montagne. Il disparut dans la jungle à la veille de sa découverte annoncée.
Fawcett connu une certaine médiatisation, et fit naitre des vocations. Depuis les années 1960 des dizaines d’expéditions archéologiques, qui parfois se sont terminées tragiquement, ont été menées pour retrouver la cité perdue de Paititi. Je ne vais pas les énumérer ici, mais en tirer deux constats :
Toutes réunies, elles n’ont permis d’explorer qu’un centième de ce continent de forêt dense.
Et partout dans l’immense zone forestière qui correspondait à l’Antisuyu, des vestiges, voire de petites cités incas furent retrouvés. Cette région encore bien méconnue, l’une des quatre grandes provinces de l’empire, devait bien avoir une capitale…
Une « légende » qui sonne trop vrai
Si comme nous l’avons vu elle a été assimilée peu à peu à l’Eldorado ou aux Cités d’or, qui sont des mythes c’est à dire la déformation imaginaire de faits réels, après 400 ans Paititi continue à aiguiser, peut-être plus que jamais, la curiosité des archéologues. Certains parmi les plus reconnus commencent même à avoir le courage d’au moins envisager sa possible réalité : En effet de nombreuses découvertes récentes remettent en question le dogme imposé par l’académie qui, dans la droite lignée de la mentalité colonialiste espagnole refuse depuis le XVIeme siècle de concevoir que dans la forêt des « sauvages » ait pu un jour se développer une quelconque forme de civilisation.
Si le royaume perdu de Paititi en particulier suscite autant d’intérêt de la part des professionnels, c’est parce que sa « légende » a une particularité : Ses sources sont très nombreuses, et certaines tout à fait dignes de confiance, car se sont les mêmes qui nous ont permis de connaître l’histoire inca. Surtout, toutes ces sources pourtant distinctes dans le temps et l’espace sont convergentes sur les moindres détails.
Les éléments qui composent la « légende » de Paititi proviennent de deux groupes de sources :
Il s’agit en grande majorité des récits de chroniqueurs de l’époque, qui rapportent les témoignages d’indiens locaux ou d’incas interrogés sur Paititi, sa localisation, ou ce qu’il y avait là-bas. Si certains auteurs avaient tendance à déformer les faits, ce n’était pas systématique loin de là, et d’autres sont réputés beaucoup plus fiables. La multiplicité et la concordance des récits de l’époque interpelle forcément.
D’autres sources sont plus récentes : il s’agit de souvenirs transmis oralement et recueillis par les anthropologues modernes auprès de tribus restées isolées jusqu’à très récemment comme les Q’eros, ou par les religieux auprès des populations des vallées au nord de Cusco, où ces histoires sont racontées au cours des veillées depuis des générations, dans chaque famille.
Un autre aspect qui interpelle, est que cette « légende » ne comporte aucun élément fantastique ou créature chimérique. Bien au contraire, toutes les descriptions indiquent des caractéristiques de la géographie du terrain, de certains bâtiments, des noms de lieux, des distances, et décrivent même précisément un certain mode de vie, des habits, des savoirs-faire, une organisation sociale bien particulière, etc…
Ces très nombreux détails réalistes et la multiplicité des sources laissent à penser que tout n’a pas pu être inventé.
© Vincent Pélissier 2016